DIAL

Universalisation de l'accès à l'eau en milieu urbain et impact des politiques tarifaires - Analyse distributive dans les métropoles de Manaus (Brésil) et Casablanca (Maroc)

Anne OLIVIER

Mai 2010

Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

Sous la direction de Denis Cogneau

Cette thèse met en évidence les inégalités d’accès au service d’approvisionnement en eau en zone urbaine et s’attache à mesurer le caractère distributif des tarifs, en s’appuyant sur les données empiriques de Manaus au Brésil et de Casablanca au Maroc. Dans ces deux contextes confrontés à une forte pauvreté urbaine, les besoins en investissements sont tels qu’ils ne peuvent pas être financés par les usagers. L’analyse empirique d’un choc tarifaire de 31,5% appliqué en janvier 2004 à l’ensemble des usagers du réseau d’eau de Manaus, permet d’évaluer l’impact sur les consommations en eau et sur le paiement des factures. L’élasticité-prix estimée par Double Différence est comprise entre -0.38 et -0.58 suivant la tendance retenue pour le contrefactuel, et est hétérogène (-0.7 pour le quintile le plus pauvre). La hausse uniforme des tarifs de l’eau à Manaus a contribué à déséquilibrer plus encore le système de péréquations, tout en pénalisant les ménages les plus modestes facturés forfaitairement. L’impact distributif des structures tarifaires à tranches progressives est ensuite examiné en simulant l’extension du réseau d’eau à Casablanca : la distribution des subventions tarifaires, régressive en raison de l’exclusion des plus pauvres jusqu’en 2006, deviendrait progressive une fois le réseau étendu. La seconde partie de l’approche par micro-simulation explore la mise en œuvre de tarifs alternatifs et montre que l’allocation pour tous de 40 l/p.j domine nettement toutes les autres structures en termes distributifs, alors qu’un ciblage par catégorie n’améliorerait que marginalement la distribution, tout en engendrant une exclusion forte. Enfin, la dernière partie effectue une synthèse comparative des résultats précédents et présente les résultats de simulations d’une extension du réseau de distribution d’eau pour des villes ayant des caractéristiques proches de celles de Manaus, Dakar et Bamako (en termes de distribution du raccordement à l’eau et de taille des ménages en particulier) : l’extension des réseaux d’eau conduit à des augmentations tarifaires qui touchent les plus pauvres. Les tarifs progressifs par tranches ont montré leurs limites pour répondre aux objectifs de redistribution lorsque la taille des ménages pauvres est importante. Cependant si l’on admet que l’objectif d’accès universel à l’eau en milieu urbain est une priorité (pour des questions de santé publique et de lutte contre l’exclusion sociale), ces tarifs devraient être jugés à l’aune de leur accessibilité pour les plus pauvres plutôt qu’à celle de leurs capacités redistributives.

 

Mots-clés : Accès à l’eau, impact distributif, demande en eau, pauvreté urbaine, tarif, élasticité-prix , Brésil, Maroc.